Liberation,
France
The United States a Step Closer to 'Legalizing Torture'
By Philippe Gangereau, Washington Correspondent
Translated By Sandrine Ageorges
September 23, 2006
France - Liberation - Original Article (French)
For the past ten days the question has been under discussion
in Congress. The debate regarding the legal use of torture has ended in almost total
victory for the White House. Unless the hitherto silent Democratic members of
the House and Senate voice their concerns, an agreement reached Thursday evening
between the Bush Administration and the three Republican senators who are opposed to a "redefinition"
of the Geneva Conventions may soon be adopted. George W. Bush pronounced himself
pleased with the compromise, which "preserves the CIA program being used
to question the world's most dangerous terrorists in order to obtain their
secrets."
"Too vague." The
debate began in June with a ruling of the Supreme Court, when Osama bin Laden's former driver, Ahmed Hamdan, appealed for his right to a
normal trial. The Court ruled that the Geneva Conventions apply to all
detainees, including "enemy combatants." The nation's top judges gave
Bush only one exit door if he wanted to continue his "secret program":
a vote from Congress. Hence the need for new legislation.
For the last ten days, a battle has erupted between
the President and three rebel Republican senators, including John McCain, a Vietnam
War veteran who underwent torture there. They opposed the White House's new
definition of the Article 3 of the 1949 Geneva Conventions, which is considered
to be "too vague." The article forbids "cruel treatment and
torture," and "outrages upon personal dignity,
in particular, humiliating and degrading treatment .
According to the version of the compromise released to
the press, it is no longer a question of modifying Article 3. However, the plan
considers that the Executive Branch has the latitude to determine if the treatment
meted out to terrorist suspects constitutes a crime, except in regard to cases of
"serious infringement."
Bush could therefore "interpret" the Conventions,
but his interpretations, which will have the force of law, will have to be published.
The compromise offers a list of "serious violations" over which the
President would have no influence: these include "torture" and "serious
physical and mental distress"; the White House insisted on the use of the
word "grave" rather than "serious." The list doesn't forbid
any specific techniques of interrogation.
And under this compromise, the American law on war
crimes, which has hitherto supported the punishments called for by the
Conventions (the United States is one of few countries to do so) would be amended to sanction only "grave violations" to the Swiss Convention.
CIA agents who have been concerned about being hauled into court by detainees can
breathe a sigh of relief.
Rights of defense. The
negotiations, conducted between the Congress and the White House at the highest
levels, were equally concerned about the right to a defense for terror suspects.
In contrast to the wishes of the administration, they will have access to
classified evidence against them, although in a slightly impaired form. "In
effect" the Washington Post railed in its editorial, " the agreement means that U.S. violations of
international human rights law can continue as long as Mr. Bush is president,
with Congress's tacit assent ."
French
Version Below
Les Etats-Unis en passe de légaliser la torture
La loi laisserait au
Président la possibilité d'interpréter les conventions en décidant si le
traitement d'un prisonnier constitue un crime ou non.
Par Philippe GRANGEREAU
QUOTIDIEN : Samedi 23 septembre 2006 - 06:00
Washington de notre
correspondant
Depuis une dizaine de jours, la question était en
discussion au Congrès. Le débat sur l'usage légal de la torture s'est achevé
par une victoire presque totale de la Maison Blanche. Un accord, intervenu
jeudi soir entre l'administration Bush et trois sénateurs républicains opposés
à la «redéfinition» des
conventions de Genève, pourrait être bientôt adopté après un vote des deux
chambres. A moins que les députés et sénateurs démocrates, jusqu'alors très
silencieux, ne fassent entendre leur voix. George W. Bush s'est félicité du
fait que le compromis «préserve le
programme de la CIA servant à interroger les terroristes les plus dangereux au
monde afin d'obtenir leurs secrets».
«Trop vague».Le
débat avait été lancé en juin par un édit de la Cour suprême, saisie par Ahmed
Hamdan, l'ex-chauffeur d'Oussama ben Laden, qui exigeait d'être jugé
normalement. La Cour avait tranché
en exigeant le respect des conventions de Genève à l'égard de tous les détenus,
y compris les «combattants illégaux».Les juges de la plus haute instance
n'avaient laissé à Bush qu'une seule porte de sortie s'il voulait poursuivre
son «programme secret»: un vote du Congrès. D'où la
nécessité de légiférer. Depuis une dizaine de jours, un pugilat opposait le Président à trois sénateurs républicains rebelles, dont
John McCain, un ancien prisonnier de guerre du Vietnam, qui a subi des
tortures. Ceux-ci s'opposaient à ce que la Maison
Blanche redéfinisse l'article 3 des conventions de Genève de 1949, jugé «trop
vague».L'article interdit «la torture, les traitements cruels, les
outrages à la dignité personnelle, en particulier les traitements humiliants et
dégradants».
Selon la version du
compromis donnée par la presse, il n'est plus question
de toucher à l'article 3. Toutefois, le projet considère qu'il revient à
l'exécutif d'assurer le respect des conventions, et laisse au Président la
latitude de déterminer si des traitements appliqués à des prisonniers suspectés
de terrorisme constituent ou non un crime, à moins qu'il ne s'agisse d'une «grave
infraction». Bush pourrait ainsi «interpréter» les
conventions, mais ses interprétations, qui auront
force de loi, devront être publiées. L'accord dresse une liste des «graves
infractions» sur lesquelles le Président n'aurait pas d'emprise :
elles comprennent la «torture»et les «sérieuses douleurs physiques et
mentales» la Maison Blanche avait pourtant insisté pour utiliser le mot «grave»au
lieu de «sérieux».La liste se garde d'interdire des techniques précises
d'interrogatoire.
Toujours selon le
compromis, la loi américaine sur les crimes de guerre, qui réprimait
jusqu'alors les violations des conventions (les Etats-Unis sont un des rares pays à le faire), serait amendée pour ne
réprimer que les «graves infractions» à la charte genevoise. Les
agents de la CIA, qui craignaient de se voir assignés en justice par des
détenus (lire ci-contre), peuvent pousser un petit
soupir de soulagement.
Droits
de la défense. Les négociations menées au plus haut niveau entre le
Congrès et la Maison Blanche ont également porté sur
les droits de la défense des suspects terroristes. Contrairement au souhait de
l'administration, ceux-ci auront accès aux documents classifiés les
incriminant, sous une forme altérée. «En pratique,fulminait vendredi un éditorial du Washington
Post, cet accord signifie que les violations américaines des lois
internationales sur les droits de l'homme peuvent se poursuivre tant que M.
Bush sera président, et ce avec l'assentiment tacite du Congrès.»